Note du transcripteur.
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Ce document est tiré de:
OEUVRES COMPLÈTES DE
SHAKSPEARE
TRADUCTION DE
M. GUIZOT
NOUVELLE ÉDITION ENTIÈREMENT REVUE
AVEC UNE ÉTUDE SUR SHAKSPEARE
DES NOTICES SUR CHAQUE PIÈCE ET DES NOTES
Volume 5
Le roi Lear.—Cymbeline.—
La méchante femme mise à la raison.
Peines d'amour perdues.—Pérclès.
PARIS
A LA LIBRAIRIE ACADÉMIQUE
DIDIER ET Cie, LIBRAIRES-ÉDITEURS
35, QUAI DES AUGUSTINS
1862
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Si cette étrange tragédie doit être rangée parmi les productionsde Shakspeare1, il est incontestable qu'elle appartient, età la jeunesse du poëte, et à l'enfance de l'art. Malone ne croitpas qu'il existe en anglais une pièce plus incorrecte, plus défectueuse,et par la versification, et par l'invraisemblance du plangénéral. Le héros, vrai coureur d'aventures, voyage continuellement.Un acte entier se passe dans un mauvais lieu, etc., etc.; il est mêmeune scène qui indigne tellement un commentateur (je crois que c'estSteevens), qu'il déclare qu'un des personnages mériterait le fouet,et que l'autre, tout roi qu'il est, devrait être renvoyé dans les coulissesà coups de pied. Il est nécessaire cependant pour l'histoirede l'art de faire connaître ses premiers efforts, et, pour l'histoire dugoût, d'apprécier ces ébauches informes qui étaient applaudies chaquesoir, dans leur temps, et imprimées in-4°, comme Périclès,avec le titre d'admirable tragédie. On se demandera peut-être aussicomment, dans ces époques arriérées où une grange servait souventde salle, on pouvait représenter des pièces d'une exécution aussidifficile que Périclès, dont la plus grande partie du dernier acte sepasse en pleine mer et sur des vaisseaux. Les machinistes de notreopéra moderne seraient peut-être eux-mêmes embarrassés pourfigurer la scène où le développement de l'action transporte ses personnages.Il faut croire que l'imagination complaisante du spectateurse prêtait à la licence du poëte, et voyait sur le théâtre ce quin'y existait pas: mer, vaisseaux, palais, forêts, etc.
L'histoire sur laquelle est fondée la tragédie de Périclès, dit Malone,auquel nous empruntons ces détails, est d'une antiquité reculée;on la trouve dans un livre jadis très-populaire, intitulé GestaRomanorum, écrit, à ce qu'on suppose, il y a plus de cinq centsans; elle est également racontée par le vieux Gower, dans sa Confessioamantis, livre VIII. Il existe en français un ancien roman sur lemême sujet, intitulé le roi Apollyn de Thyr, par Robert Copland.Mais puisque l'auteur de Périclès a introduit Gower dans sa pièce, ilest tout naturel de penser qu'il a suivi surtout l'ouvrage de ce poëtedont il a même évidemment emprunté plusieurs expressions.
Steevens cite plusieurs autres histoires de Périclès, tantôt appeléroi, tantôt prince, et plus