Titre original: FORMULE PENTRU SPIRIT
Les poèmes d'Ovidiu Florentin1, de sa plaquette. "Formules pour l'esprit" (editura Litera, Bucuresti, 1981), "bleus comme l'heure et tendres comme la timidité, assaillis de quiétude et vaincus d'appels" —ainsi qu'il le déclare dans une ars poetica d'ouverture: "Avant le propos"—, ayant quelques "vers herbeux, grandis dans le duvet ouaté d'un songe", "au corps vert comme la vie, aux yeux bleus comme l'espérance", "plus pure que la santé"—tel qu'il nous le confie, dans la conclusion: "Au-delà du propos", avec des symboles heureusement choisis auprès d'une onde distinctive du novecentismemontal—ungarettienne, non assimilée intégralement, nous donnent, toutefois, la certitude d'une voix lyrique, se trouvant, évidemment, en un permanent "état-de-moi"—comme il nous le dit dans un titre qui se veut une lyro-définition de l'esprit ("L'esprit est un état-de-moi")—voix dont nous entendrons parler dans les saisons futures de la poésie roumaine contemporaine, en aucun cas dans le registre des clameurs, de mode passagère, mais, plutôt, psalmodiale. L'arc voltaïque des existences d'Ovidiu Florentin se déploie entre infini et poème—l'infini et le poème illustrant la dichotomie optative: "Je vis en de nombreux lieux, en plusieurs/lieux à la fois—et dans chaque / vers je laisse seulement l'une de mes vies, rien / qu'unevie. // L'éloignement sera mon tombeau, / et mon cercueil: l'infini!" (Avant le propos); "Le temps se suspend à mon cou / telle une meule de pierre / ...// Mais je vis, je vis jusque dans la rue / jusque dans la ville / jusque dans lachambre où je travaille". (L'esprit est un état-de-moi). Remarquable est chez[4]ce poète l'acuité de la perception, bien entendu, transmise au récepteur par unesuite de métaphores révélatrices, par des syntagmes d'une véritable force poétique:"Parmi l'herbe le temps joue / nu-pieds / ...// et les questions déambulent,leurs langues tirées / comme vipères, prêtes à mordre." (Le rouge du sangs'écoule toujours en moi); "Les maïs / allument des fanals / sous leurs ailes.";
"Soutenues par leurs béquilles / les illusions cheminent, / à travers la boue dela nuit / les étoiles marchent / en bottes." (La lumière pèse lourdement enveilleuse); "Hélas, l'esprit / heurte le corps." (Parc sans amoureux); "Air auxyeux de bronze"; "Guêpiers chroniques / de corydales ..."; "Je lis les rivièreset les écris / avec des pierres"; "Il pleut si longuement que croissent mousseset lichens /juste sur le coeur." (La vie, la pauvre, perd son temps) etc.
La lecture fidèle des poèmes d'Ovidiu Florentin nous convainc que le poèteil atteint "de son front le chant du rossignol".
15 août 1982.
ION PACHIA TATOMIRESCU