PAR
LOUIS LACOUR
LA FILLE ABHORRANT MARIAIGE
LA VIERGE REPENTIE
MDXXXVIII
PARIS
AUGUSTE AUBRY, LIBRAIRE-ÉDITEUR
16, rue Dauphine
1856
Paris.—Impr. de Dubuisson et Ce, r. Coq-Héron, 5.
Tout brillants qu'aient été les écrivains du siècle de Louis XIV, leurplus grande gloire est d'avoir donné le dernier coup de lime à ce beaustyle que leur avaient transmis leurs ancêtres. Le siècle suivant laissala forme éclatante pour les grandes pensées; le nôtre, éclectique de sanature, a cherché à concilier les efforts de ses prédécesseurs, en couvrantde dehors pompeux des conceptions profondes et hardies: il apéniblement gravi les sentiers qui le conduisaient à sa ruine. On attendune régénération, et nous n'en voyons la possibilité qu'en se retrempantaux sources vives de notre littérature. Comment! les œuvres qui ontformé les La Fontaine, les Corneille, les Racine, les Pascal, les Molière,seraient-elles destinées à n'enfanter plus que des pygmées1?Les fantaisistes de nos jours, en ne demandant qu'à eux-mêmes leursinspirations, n'ont malheureusement rien produit; malgré cette impuissance,chacune de leurs œuvres, ils le proclament, est une Minervesortie tout armée de leur cerveau. Ils n'ont été les élèves de personne,et ils veulent être les maîtres de tout le monde; mais plus ils écrivent,plus l'isolement se fait autour d'eux, et l'école toute-puissantepar laquelle ils se croyaient vénérés, s'évanouit peu à peu et disparaîtcomme un songe.
Diogènes du dix-neuvième siècle, qui promenez partout votre lanternepour trouver un homme, qui rencontrez-vous? À peine une oudeux figures où brille un rayon du feu sacré. Les autres, sans expression,aux yeux incapables de fixer le ciel, portent les stigmates des racesdégénérées.
Où sont les littérateurs?
Sont-ils dans ces feuilletons qui réimpriment en français de fantaisiemille anecdotes extraites de mauvais romans anglais ou françaisdes deux derniers siècles? Si de patientes statistiques avaient relevé lenombre de romans parus, depuis qu'un livre a pu prendre ce nom,quel effroyable chiffre aurions-nous sous les yeux! En vérité, je lerépète, les romans d'aujourd'hui sont faits, pour la plupart, avec desmatériaux empruntés à ces romans d'autrefois, que leurs plagiaires ontraison de regarder comme oubliés à jamais dans les rayons poudreuxdes bibliothèques.
Sont-ils dans ces livres de critique remplis de nouvelles observationsqui ne courent le monde que depuis deux cents ans; car si lesromans abondent, que dirons-nous des journaux? Et pourtant ils n'étaientpoint connus avant 1600; moins de 150 ans après, leur nombre,en France seulement, s'élevait à dix mille volumes. Si l'on pense decombien d'observations, de faits, ces volumes sont remplis, l'imaginations'effraie; mais depuis 1750, erreur de ce calcul, cent millevolumes sont venus s'ajouter aux dix mille autres? Qui voudrait secharger de compter les répétitions, les plagiats? Ce travail, la vie entièrede bien des gens ne suffirait pas à l'accomplir.
Pour arriver au théâtre, qui doit m'occuper particulièrement, la littératures'y est-elle réfugiée? Moins qu'autre part! Où puisent les auteursdu jour? Dans le répertoire des lazzis du théâtre italien, tissude bons mots do