Notes au lecteur de ce fichier digital:

Seules les erreurs clairement introduites par le typographe ont étécorrigées.

COURS FAMILIER
DE
LITTÉRATURE

UN ENTRETIEN PAR MOIS

PAR
M. A. DE LAMARTINE

TOME SEIZIÈME

PARIS
ON S'ABONNE CHEZ L'AUTEUR,
RUE DE LA VILLE L'ÉVÊQUE, 43.

1863

L'auteur se réserve le droit de traduction et de reproduction àl'étranger.

COURS FAMILIER
DE
LITTÉRATURE

REVUE MENSUELLE.

XVI

Paris.—Typographie de Firmin Didot frères, fils et Cie, rue Jacob, 56.

(p. 5) XCIe ENTRETIEN.

VIE DU TASSE.

(PREMIÈRE PARTIE)

I.

De tous les hommes qui ont illustré leur nom dans les œuvres del'esprit, le Tasse est peut-être celui dont la vie et l'œuvre seconfondent le mieux dans une conformité plus complète. Son œuvreest un poëme, sa vie une poésie: en lui naissance, patrie, nature,génie, vie, amour, infortune et mort, tout est d'un (p. 6) poëte. Onne sait, quand on le lit, si c'est l'homme qui est le poëme ou sic'est le poëme qui est l'homme. Nous allons écrire son histoire leplus poétiquement aussi que nous le pourrons; d'une main qui dans unautre âge écrivit des vers; mais nous n'ajouterons aucune circonstanceou aucune couleur imaginaire à la merveilleuse vérité de ce récit. Lesétudes de vingt ans d'un de ces hommes studieux que l'enthousiasmeattache aux grandes renommées avec une sorte de piété littéraire commela curiosité attache certains érudits à la pierre sépulcrale desvieilles tombes pour déchiffrer des épitaphes, M. Black, et nospropres recherches en Italie pendant de longues années de loisir, nousont révélé sur la vie aventureuse et mystérieuse du Tasse tout ce quiavait été jusqu'ici énigme, conjecture ou préjugé historique. Ce réciten sera peut-être moins romanesque, mais quel roman eut jamaisl'intérêt de la vérité? M. Black, guidé par la vie du Tasse, écrite en1600 par le marquis Manso, qui avait connu et aimé le poëte, et parl'histoire plus récente de l'abbé Serassi, a suivi trace à trace, danstoutes les archives et dans toutes les bibliothèques d'Italie, pendantdix ans, les moindres lueurs de vérité qui pouvaient (p. 7)recomposer le vrai jour sur la vie de son héros; moi-même, une sortede piété semblable à une parenté des âmes m'attira de bonne heure versce nom comme un pèlerin vers un sépulcre. C'est d'un sépulcre en effetque naquit en nous ce premier culte de mon imagination et de moncœur pour le chantre de à Jérusalem délivrée.

II.

Un soir d'automne de l'année 1812 je visitais pour la première foisRome, ville presque déserte alors par l'enlèvement du pape et par ladispersion des pontifes de l'Église romaine, que Napoléon avaitemprisonnés à Savone. On ne rencontrait dans les rues que des soldatsfrançais du général Miollis, gouverneur de Rome, et des bandes depauvres moines affamés portant la pioche ou roulant la brouette pourgagner quelques baïoques (monnaie romaine) en déblayant lesmonuments de l'antiquité de leur propre ville, à la solde des barbaresétrangers. C'était la dispersion de Babylone (p. 8) par la main de cemême guerrier que le pape avait si docilement couronné pour appuyerson autel sur le trône. J'ai revu bien souvent depuis la Villeéternelle, mais jamais sa physionomie désolée ne me parut convenirdavantage qu'alors à la mélan

...

BU KİTABI OKUMAK İÇİN ÜYE OLUN VEYA GİRİŞ YAPIN!


Sitemize Üyelik ÜCRETSİZDİR!