SOUVENIRS

DE

MADAME LOUISE-ÉLISABETH

VIGÉE-LEBRUN,

DE L'ACADÉMIE ROYALE DE PARIS,
DE ROUEN, DE SAINT-LUC DE ROME ETD'ARCADIE,
DE PARME ET DE BOLOGNE,
DE SAINT-PÉTERSBOURG, DE BERLIN, DEGENÈVE ET AVIGNON.



En écrivant mes Souvenirs, je me rappellerai
le temps passé, qui doublera pour ainsi
dire mon existence.

J.-J. Rousseau.


TOME SECOND


PARIS,

LIBRAIRIE DE H. FOURNIER,

RUE DE SEINE, 14 BIS.

1835.



AVANT-PROPOS

DE L'AUTEUR.

La mort de la bonne et aimable princesse Kourakin, que le choléra vintenlever à Pétersbourg en 1831, m'avait fait renoncer pendant long-tempsà toute idée de continuer mes Souvenirs, pour lesquels cependantj'avais déjà rassemblé les matériaux nécessaires. Les instances de mesamis m'ayant fait consentir l'an dernier à reprendre ce travail, lelecteur ne sera pas surpris de voir mon second volume écrit dans uneautre forme que le premier, puisque je n'ai point eu le bonheurd'achever le récit de ma vie pour celle qui me l'avait faitentreprendre.




CHAPITRE PREMIER.

Turin, Porporati, le Corrége.--Parme, M. de Flavigni, les Églises,l'Infante de Parme.--Modène.--Bologne.--Florence.




Après avoir traversé Chambéry, j'arrivai à Turin extrêmement fatiguée decorps et d'esprit, car une pluie battante m'avait empêchée, pendanttoute la route, de descendre pour marcher un peu, et je ne connais riende plus ennuyeux que les voiturins qui cheminent constamment au pas.Enfin, mon conducteur me déposa dans une très mauvaise auberge. Il étaitneuf heures du soir; nous mourions de faim; mais comme il ne se trouvaitrien à manger dans la maison, ma fille, sa gouvernante et moi, nousfûmes obligées de nous coucher sans souper.

Le lendemain de très bonne heure, je fis prévenir de mon arrivée lecélèbre Porporati1, que j'avais beaucoup vu pendant son séjour àParis. Il était alors professeur à Turin, et il vint aussitôt me faireune visite. Me trouvant si mal dans mon auberge, il me pria avecinstance de venir loger chez lui, ce que je n'osai d'abord accepter;mais il insista sur cette offre avec une vivacité si franche, que jen'hésitai plus, et faisant porter mes paquets, je le suivis aussitôtavec mon enfant. Je fus reçue par sa fille, âgée de dix-huit ans, quilogeait avec lui, et qui se joignit à son père pour avoir de moi tousles soins imaginables pendant les cinq ou six jours que je passai dansleur maison.

Étant pressée de continuer ma route vers Rome, je ne voulus voirpersonne à Turin. Je me contentai de visiter la ville et de fairequelques excursions dans les beaux sites qui l'environnent. La ville estfort belle; toutes les rues sont parfaitement alignées et les maisonsbâties régulièrement. Elle est dominée par une montagne appelée laSuperga, lieu de sépulture, destinée aux rois de Sardaigne.

Porporati me conduisit d'abord au musée royal, où j'admirai unecollection de superbes tableaux des diverses écoles, entre autres celuide la femme hydropique de Gérard Dow2, qu'on peut appeler unchef-d'oeuvre dans son genre, et plusieurs tableaux admirables deVandick, parmi lesquels je dois citer celui qui représente une famillede bourguemestres, dont le

...

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